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Histoires de loups

La bête des Cévennes

Le vendredi 1er décembre 2006, par Jean-Pierre Bernard

Les loups ont longtemps hanté nos campagnes, jusqu’à ce qu’ils disparaissent presque complètement, du moins à l’état sauvage.

Les histoires de loups ont enflammé l’imagination des enfants, et un sentiment mêlé de crainte et d’attrait, le soir dans le lit, subsistait dans les petites cervelles jusqu’à l’endormissement des bambins.

Et puis, que d’histoires autour de cet animal mythique, la plus connue restant sans doute celle du fameux "petit chaperon rouge", rencontrant le loup qui avait décoré sa grand-mère.
Cette histoire, comme toutes les légendes, découle naturellement de faits réels.

Bien sûr "on dit" que le loup n’attaque pas l’homme ; c’est noté dans beaucoup de livres sur ce sujet. Mais... et si on rencontrait un loup "qui n’aurait pas lu le livre ?"

Plus sérieusement, on sait que le loup, poussé par une faim extrême, a assez souvent attaqué l’humain. Sans doute parce qu’il n’avait pas le choix, ne trouvant que nulle subsistance autour de lui, sur son territoire de chasse, particulièrement aux hivers les plus rigoureux.
Peut-être aussi a-t-il parfois préféré les petits enfants, pouvant plus aisément les attraper, se défendant moins, et à la chair plus tendre.
Au début du 19e siècle, il n’était pas encore rare d’en rencontrer sur son chemin, et voici plusieurs récits de rencontres réelles avec ces animaux.

La première rencontre avec un loup que nous allons évoquer ici, se situe dans le Gard, tout particulièrement près de Concoules, au nord et en frontière de ce département.
Un particulier, qui venait des environs de Villefort, situé à environ 10 kilomètres au nord de cette ville, cheminait tranquillement sur la route, se rendant à Genolhac, dans le Gard, à environ 7 kilomètres de Concoules.
Il marchait sur ce qu’est à présent la route départementale D 906, dans la forêt des Cévennes qui devait à l’époque être encore plus fournie que de nos jours.
Arrivé donc près de Concoules, il rencontra un gros loup qui était campé sur le chemin. Comme il était sans armes, il voulut le faire fuir par des cris et par des gestes menaçants. Il insista durant un moment, mais ce fut en vain : l’animal ne bougea pas. Le voyageur fut obligé de lui céder le pas, et de se détourner pour l’éviter.
Il raconta son histoire, qui se colporta rapidement dans la région, assurant que le loup était d’une taille et d’une grosseur exceptionnelles.
Mais il eut de la chance, car le loup n’avait pas tenté de l’attaquer.

Sans doute parce que cela se passait le 23 juillet 1809, en plein été, et que le loup n’était pas affamé.
Mais, tout de même, un pareil évènement est sans exemple en cette saison : on avait bien vu en hiver, quand le pays est couvert de neige, des loups pressés par la faim attendre les passants sur les routes, mais jamais on n’avait entendu parler de pareilles rencontres durant l’été.
On assure que, dans la région, un loup (sans doute était-ce le même) avait été aperçu par quelques personnes, qui ont dit qu’il était d’une grosseur énorme.

Quelques mois plus tard, en octobre, un animal féroce répandait la terreur depuis quelques jours dans ce premier arrondissement du Gard : comme autrefois la "bête du Gévaudan", la "bête des Cévennes" exerçait ses ravages dans cette contrée. Cette bête, quoi qu’on en dise, était un loup, mais, cette fois, en cette saison, qui devait être affamé.

Toujours dans la même région, le 2 octobre, à dix heures du matin, tout près du hameau de Planzolles, à environ une lieue de Genolhac, un petit garçon âgé de six ans gardait un troupeau avec son grand-père, vieillard de 80 ans. Une chèvre s’étant écartée du troupeau, le vieillard ordonna à son petit-fils de la chercher et de la ramener. L’enfant obéit et, l’instant d’après, la chèvre rejoignit le troupeau.
Mais l’enfant ne reparut point. Le grand-père, inquiet, parcourut les environs pour le trouver, sans résultat.
Ayant alerté les gens du voisinage, on le chercha de tous côtés pendant le reste du jour et toute la nuit. Mais ce ne fut que le lendemain, qu’on trouva, avec ses vêtements ensanglantés, les traces de son corps dévoré, dont il ne restait que quelques ossements et une partie d’un bras avec la main.

Le 6 du même mois, vers 18 heures 30, une petite fille de sept ans qui habitant Malenches, un village des environs de Genolhac, qui jouait dehors, s’était un peu écartée de sa maison.
Ses parents s’aperçurent bientôt de son absence, et commencèrent à s’alarmer, surtout lorsque quelqu’un rapporta l’avoir entendu crier et appeler sa mère.
Des recherches sont entreprises aussitôt, et au bout d’un moment, on ne trouva d’elle que ses habits déchirés et teints de sang, quelques os et la tête entière.

Ce qui a servi à accréditer l’opinion que l’animal qui a fait ces ravages n’est pas un loup, mais plutôt une hyène, ou quelqu’autre bête féroce, ou même un monstre, c’est que, contre l’instinct bien connu des loups, celui-ci laissa la chèvre pour dévorer l’enfant. Il ne faut pas voir une préférence dans ce premier cas de sa férocité contre l’espèce humaine.
Il est bien plus vraisemblable que la chèvre ayant vu de loin son ennemi, prit la fuite, et que l’animal carnassier, voyant qu’il ne pouvait pas atteindre sa proie, et qu’elle allait rejoindre le troupeau qui était gardé par un homme, se jeta sur l’enfant qui se trouvait isolé et qui, à cause de sa petite taille, ne pouvait lui opposer une grande résistance. Mais que penser du deuxième cas, celui de la petite fille ?
Il n’est peut-être pas étonnant qu’après avoir tâté de la chair humaine, cet animal l’ait préféré à toute autre, et qu’il ait attaqué des enfants, et même des hommes, pour satisfaire sa faim.

Voici un autre récit d’attaque de loup, mais, cette fois, probablement enragé, qui sema l’effroi dans un village, et fut combattu par les hommes jusqu’à ce que ceux-ci réussissent à en avoir raison.

L’histoire se passa à Premières, village situé en Côte d’Or, non loin de Dijon, entre Genlis et Auxonne.
Dans la nuit du 27 au 28 septembre 1809, un loup pénétra dans l’enceinte de ce village. Il se présenta tout d’abord à la porte d’un bûcheron, qu’il a fortement secouée.
Celui-ci, éveillé par le bruit, constate qu’il s’agit d’un loup, s’arme d’un bâton ferré et aperçoit l’animal qui, avec ses dents, brisait une légère cloison. S’en approchant avec méfiance, il réussit à lui porter plusieurs coups qui le font lâcher prise.

Devenu furieux, l’animal fait quelques autres dégâts, et finit par pénétrer dans l’étable d’une maison voisine. Il mord le chien qui était arrivé sur place, puis se jette sur une vache dont les beuglements réveillent également les maîtres de la maison qui, prévenu par le coupeur de bois que l’animal est enragé, rentrant dans la maison, et se contentent de réussir à l’éloigner, non sans l’avoir vu renverser une ruche et mordre leur pourceau.

L’animal ne s’en tient pas là ! A travers la fenêtre d’une autre maison qu’elle avait brisée, cette bête féroce allait réussir à enlever un enfant dont le berceau était posé sur une table très proche, lorsque heureusement un chien lui saute à la gorge, le terrasse, l’entraîne près du domicile de son maître.
Celui-ci, un nommé Tabard, vole au secours de son chien, et, en ouvrant sa porte, le chien et le loup se précipitent dans la chambre, et s’y livrent à un nouveau combat.
Les deux filles de Tabard accourent aux cris de leur père, qui luttait aussi contre son dangereux hôte. L’une d’elle, en cherchant de quoi faire de la lumière, a les deux mains prises dans la gueule du loup ; sa soeur les lui dégage à l’aide d’une serpe.
Enfin, on parvient à allumer une lampe, et le loup s’enfuit à la vue de la lumière.
Mais Tabard, qui s’était ressaisi, avait eu le temps de s’armer d’un fusil. Il ajuste l’animal, tire, l’étend par terre, l’achève ensuite à coups de massue.

Fallait-il que ces loups soient vraiment affamés pour ne pas craindre de s’aventurer dans les villages et tenter de pénétrer dans les maisons !
Dans le dernier cas, le loup cherche aussi à s’emparer d’un petit enfant. Est-ce vraiment par goût de la chair humaine, ou bien parce que la résistance opposée était faible ?

Quoi qu’il en soit, ces récits sont du passé. De nos jours, même à pied et la nuit, on ne risque plus d’être attaqué par un loup. Il n’y en a plus, à part quelques tentatives de "réinsertion", et certains parcs zoologiques ou animaliers qui en détiennent quelques uns.

Par contre, on risque bien plus de rencontrer encore quelque rôdeur ou quelque mauvais larron, qui tentera de vous soustraire le portefeuille, en vous bousculant, voire en vous frappant méchamment !

Et les petits enfants ? Frissonnent-ils encore lorsqu’on leur raconte des histoires de loups ?

Si toutefois on en raconte encore...

(d’après des renseignements tirés de : "Annales périodiques de la ville d’Orléans" - 6e année - 2e semestre - numéros 603 et 610 - année 1809).

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7 Messages

  • > Histoires de loups 2 décembre 2006 10:01

    Deux livres à lire sur le sujet : Marie-Jeanne, sorcière de Flandre aux Editions "le Marais du Livre" et "La baronne de Draek", la Dame au Loup de Marie Pette-Debril. Amicalement.

    Répondre à ce message

  • > Histoires de loup : la peur de nos ancêtres ? 13 décembre 2006 18:12, par Michèle Champagne

    Il existe des légendes au Québec, dans la région de Trois-Rivières qui portent sur les loups, loups-garous, bêtes féroces en tout genre. Souvent ces légendes sont associées à des hommes et à des femmes, en proie à une inquiétude suscitée par des villages qui s’urbanisent, ne serait-ce que par la venue d’une industrie du bois, la conquête de nouveaux territoires suite au déboisement, la proximité avec une nature souvent méconnue, la malédiction que l’on associe aux épidémies, aux malheurs, au mauvais sort. Votre article est intéressant car il donne quelques idées pour enrichir l’histoire d’une famille sur plusieurs générations en situant nos ancêtres dans ces contes et légendes qui ont baigné leur imaginaire. Cela me donne d’ailleurs l’idée de proposer un article sur le site Histoire et Généalogie sur les loups et les hommes changés en loup..... de quoi passer une nuit blanche digne d’un bon roman d’horreur.
    Michèle Champagne

    Répondre à ce message

    • > Histoires de loup : la peur de nos ancêtres ? 16 décembre 2006 12:05, par Jean-Pierre Bernard

      Bonjour.
      Juste pour vous remercier de l’intérêt que vous avez porté à lire mon petit article.
      Il serait intéressant que vous composiez votre article projeté sur les hommes changés en loups !
      Nous guetterons sur notre site....
      Cordialement.
      Jean-Pierre BERNARD

      Répondre à ce message

  • Histoires de loups 2 octobre 2008 08:13, par Patrick GEOFFROY

    Bonjour
    Intéressé par toutes les histoires de loups et autres bêtes, décrits comme de véritables fléaux animaliers, je recherche toute documentation afin de réaliser un dossier "Le chemin des loups" pour le groupe Généalogie-Calamités.
    Merci et bravo pour l’article
    Je suis de Côte d’or
    Patrick Geoffroy

    Voir en ligne : Généalogie et calamités

    Répondre à ce message

    • Histoires de loups 2 octobre 2008 09:49, par Jean-Pierre BERNARD

      Bonjour.
      Merci pour votre commentaire. J’ai pris bonne note de votre quête, et vous ferai part d’autres anecdotes le cas échéant.
      Cordialement.
      Jean-Pierre BERNARD ;

      Répondre à ce message

  • Histoires de loups 8 août 2009 15:54, par Mireille Marthe

    Sur ce sujet,on peut lire l’excellent article de Jean Marc Moriceau accompagné d’une abondante bibliographie :"Rage et loups au XVIIe siécle ; angoisse et insécurité dans les campagnes au sud de Paris" paru dans le bulletin de la société historique et archéologique de Corbeil,de l’Essonne et du Hurepoix (année 1991)
    Voici également un extrait du registre paroissial de Saint Jean de Beauregard (91)qui relate la mort d’une petite fille qui a été dévorée au début de la grande attaque des loups qui a fait beaucoup de victimes dans le royaume entre 1690 et 1695

    "Ce jourd’huy vingt troisièmes jour du mois de fébvrier mil six cent quatre vingt treze a esté inhumé dans le cimetière de cette parroisse une partie de la teste de Marie Mignet qui a esté trouvée dans les bois de Marcoussis où elle a estée dévorée par les loups en gardant les vaches, le premier jour dudit mois, âgée de unze ans ou environ, fille légitime de Jean Mignet et de défuncte Claude Laurens,par moy, soubsigné curé de cette dite paroisse de Saint jean de Beauregard en présence de Jean Mignet son père,André Leduc et Jacques Houdière, qui ont signé avec moy et quand au ledit Mignet a déclaré ne scavoir signer"(AD 91 4E/2580)

    Répondre à ce message

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